Oxygène dissous
|
♦ La teneur en oxygène moléculaire (O2) dissous est un paramètre important qui gouverne la majorité des processus biologiques des écosystèmes aquatiques. La concentration en O2 dissous est la résultante des facteurs physiques, chimiques et biologiques suivants :
- Échanges à l'interface air-océan
- Diffusion et mélange au sein de la masse d'eau
- Utilisation dans les réactions d'oxydation chimique (naturelles ou anthropiques)
- Utilisation par les organismes aquatiques pour la respiration (ce qui inclut au sens large la dégradation bactérienne des matières organiques) et pour la nitrification
- Production in situ par la photosynthèse.
> Le pourcentage d'oxygène par rapport à la saturation doit également être pris en compte. La dissolution de l'oxygène dans l'eau est en effet régie par des lois physiques et dépend de la pression atmosphérique, de la pression de vapeur saturante, de la température de l'eau, de la salinité. Pour une valeur donnée de chacun de ces paramètres, la solubilité maximale de l'oxygène dans l'eau est appelée saturation. Tous les processus exclusivement mécaniques d'échange eau-atmosphère, tel que l'effet du vent ou de la houle, le ruissellement et le bullage, tendent à porter l'eau à son niveau de saturation en oxygène. Les états de sous-saturation et sursaturation ne peuvent donc être induits que par les phénomènes physico-chimiques, chimiques et biologiques sus-cités.
> La solubilité de l'O2 dans l'eau diminue en fonction de la salinité et de la température. À 20°C, la solubilité de l'oxygène est de 9 mg/L dans l'eau douce et de 7,4 mg/L dans de l'eau salée à 35 °/oo. Ce sont les processus biologiques qui ont généralement une influence prépondérante sur les concentrations en oxygène dans l'eau. Ainsi, dans les estuaires, des zones d'accumulation de détritus carbonés en décomposition peuvent devenir totalement anoxiques ; la nitrification de l'azote ammoniacal est également une source importante de déficits en oxygène. Par ailleurs, en zone eutrophe, des développements importants de phytoplancton ou de macroalgues peuvent engendrer des sursaturations diurnes atteignant 150 voire 200 %.
> L’O2 dissous est l’élément de base pour la survie de la quasi-totalité des organismes vivants (à l’exception des bactéries anaérobiques). Une perturbation de ce paramètre, telle qu’une hypoxie ou en cas extrême, une anoxie, engendre de multiples conséquences sur les espèces vivantes : barrière à la migration, fuite des habitats, modifications physiologiques ou encore mortalité. L’une ou l’autre de ces conséquences sera fonction de la durée et de l’importance de la déficience en oxygène dissous et des besoins et tolérances des différentes espèces. L’O2 dissous dans l’eau provient des échanges air-eau et résulte également de processus de photosynthèse (phytoplancton et macrophytes). L’oxygénation des eaux est également régulée par les conditions physiques et physico-chimiques du milieu : une hausse de la température ou de la salinité, un hydrodynamisme insuffisant sont autant de facteurs limitant cette oxygénation. L’O2 dissous est par ailleurs consommé par les organismes vivants d’une part (respiration), lors de la dégradation de la fraction organique présente et l’oxydation de substances chimiques réduites d’autre part. Ces deux derniers processus sont naturels. En revanche, depuis plusieurs décennies, les activités anthropiques ont augmenté de manière accrue les apports nutritifs (rejets industriels, urbains ou agricoles) engendrant des déficits en oxygène parfois très importants (eutrophisation des eaux et dégradation de la matière organique produite, oxydation directe de l’ammonium). Dans les zones les plus turbides, les taux en O2 dissous sont naturellement plus faibles du fait de la turbidité qui limite la pénétration de la lumière et donc la photosynthèse, mais également en lien avec le rôle autoépurateur du bouchon vaseux. La teneur en O2 dissous des eaux estuariennes est très dépendante de la température de l’eau, de sa salinité (à moindre échelle), mais aussi de l’hydrodynamisme des masses d’eau. Propagation de la marée, et présence de débits fluviaux soutenus sont à l’origine d’une agitation des eaux qui favorise leur ré-oxygénation. Inversement, un faible hydrodynamisme engendre une moindre agitation des eaux et une mauvaise ré-aération. De plus, dans ces conditions, les temps de résidence des eaux dans l’estuaire s’allongent et le bouchon vaseux stagne lui aussi plus longuement dans ce système. Il y a donc de faibles renouvellements et des oscillations limitées des masses d’eaux, associées à la présence du bouchon vaseux. Dans celui-ci, d’importants processus bactériens de dégradation de matière organique biodégradable se produisent et sont à l’origine d’une importante consommation en oxygène dissous, non compensée par la production d’oxygène due à une éventuelle photosynthèse. En effet, la forte turbidité ne permet la pénétration de la lumière que dans les premiers centimètres de la colonne d’eau. Enfin, la présence de zones urbaines et industrielles de grande ampleur, qui constituent des sources probables d’apports de matériels organiques très dégradables, a elle aussi un rôle majeur sur la désoxygénation possible des eaux estuariennes.
> Au niveau de la zone de turbidité maximale, deux processus réduisent la quantité d’oxygène dans l’eau :
- La fraction organique biodégradable associée aux grandes quantités de matières en suspension fait l’objet d’une dégradation avec consommation d’oxygène dissous, phénomène amplifié s’il y a présence de rejets d’origine anthropique, le plus souvent très riches en matières organiques dégradables
- La forte turbidité limite en surface la pénétration de la lumière ne permettant pas de production primaire et donc de production d’oxygène dissous par photosynthèse, susceptible de compenser la consommation. Ainsi, lorsque la turbidité est maximale, la concentration en oxygène est minimale.
> Le niveau d’O2 dissous varie principalement selon les facteurs suivants :
- Le degré de turbulence. Un brassage important augmente le contact eau-air et par conséquent le taux d’O2 dissous
- La température de l’eau, une eau fraîche contenant plus d’oxygène dissous qu’une eau chaude
- La consommation par les animaux, les plantes et de façon plus importante, par les bactéries qui dégradent la matière organique diminue le taux d'oxygène dissous. Plus il y a de matière organique dans une eau, plus la demande en O2 est élevée. Lors d’une forte pluie, il peut y avoir des apports importants de matière inorganique et/ou organique dans l’eau, et le taux d’oxygène dissous résultant peut être inférieur à la normale durant quelques jours ou quelques semaines. Les autres sources de matière organique sont par exemple, les eaux usées et les eaux de ruissellement. L’effet de ces effluents sur l’oxygène du cours d’eau peut être établi en mesurant la teneur en oxygène dissous avant et après le rejet
- La photosynthèse des plantes et des algues peut faire varier les taux en oxygène dissous sur une période de 24 heures. Le jour, les plantes produisent de l’oxygène (le maximum est atteint au début de l’après-midi où le pourcentage de saturation peut excéder 100 %). La nuit, elles consomment de l’oxygène lors de leur respiration (taux minimum juste avant le lever du soleil).
Le pourcentage (%) de saturation est une mesure permettant de comparer plus facilement les données d'oxygène dissous entre différents sites ou à différentes dates. Pour calculer le pourcentage de saturation en oxygène, on compare la valeur mesurée à la valeur maximum d’O2 dissous que peut contenir l’eau à la température observée. Ces valeurs maximales (C°max) sont fournies dans le tableau ci-dessous. Elles correspondent à la quantité maximum d’oxygène qui peut être dissous dans un litre d’eau, pour des températures données.
% Saturation = (Valeur mesurée d’O2 dissous dans l’eau / C°maxO2) x 100
C°maxO2 selon la température
─────────────────────────── Temp. Oxygène Temp. Oxygène dissous dissous °C mg/L °C mg/L ─────────────────────────── 14,60 23 8,56 1 14,19 24 8,40 2 13,81 25 8,24 3 13,44 26 8,09 4 13,09 27 7,95 5 12,75 28 7,81 6 12,43 29 7,67 7 12,12 30 7,54 8 11,83 31 7,41 9 11,55 32 7,28 10 11,27 33 7,16 11 11,01 34 7,05 12 10,76 35 6,93 13 10,52 36 6,82 14 10,29 37 6,71 15 10.07 38 6,61 16 9,85 39 6,51 17 9,65 40 6,41 18 9,45 41 6,31 19 9,26 42 6,22 20 9,07 43 6,13 21 8,90 44 6,04 22 8,72 45 5,95 ──────────────────────────
|
> Concentrations d'oxygène dissous généralement observées dans les cours d’eau :
- Pour les mg/L :
- 0 à 2 mg/L >> Taux d'oxygène insuffisant pour la survie de la plupart des organismes - 2 à 4 mg/L >> Seules certaines espèces de poissons et d'insectes peuvent survivre - 4 à 7 mg/L >> Correct pour la plupart des organismes des étangs Acceptable pour les espèces de poissons d'eau chaude Faible pour les espèces de poissons d'eau froide - 7 à 11 mg/L >> Idéal pour la plupart des poissons d'eau courante froide.
- Pour le pourcentage de saturation :
- Moins de 60 % >> Faible - 60 à 79 % >> Acceptable pour la plupart des organismes d'eau courante - 80 à 125 % >> Excellent pour la plupart des organismes d'eau courante - 125 % ou plus >> Trop élevé ; peut être dangereux pour les poissons. > Généralement, les valeurs observées en eau courante devraient être supérieures à 80% de saturation le jour et à 70% la nuit. Dans un lac ou un estuaire, des valeurs de 70% de saturation sont recommandées tandis qu’en eau salée, des valeurs de 80% sont acceptables. L'oxygène dissous est crucial pour de nombreux processus chimiques et biologiques qui se produisent dans le cours d'eau tels que :
- La respiration • La décomposition • La conversion d'éléments nutritifs en formes utiles
- La transformation de composés chimiques en formes moins dangereuses • Ainsi que pour plusieurs autres fonctions vitales.
Équivalent étranger : Dissolved oxygen.
|
Paiements pour services environnementaux
|
♦ Acronyme : PSE ♦ Un paiement de services environnementaux (PSE) correspond à une transaction volontaire ou à un service environnemental (SE) clairement défini, où un type d’exploitation du sol permettant d’assurer ce service est acquis par au moins un acheteur de SE auprès d’au moins un fournisseur de SE si et seulement si le fournisseur continue d’assurer le service en question (Wunder, 2005). Le concept de SE est également défini ainsi : les paiements pour les services environnementaux constituent des mécanismes qui visent à favoriser des externalités environnementales positives grâce au transfert des ressources financières entre les bénéficiaires de certains services écologiques et les fournisseurs des services ou les gestionnaires de ressources environnementales (Mayrand & Paquin, 2004)
> Le terme de services environnementaux se réfère aux nombreux processus par lesquels les écosystèmes et les espèces qui les composent, rendent possible la vie humaine, générant des profits en produisant des marchandises ou par les différents services culturels de régulation et de support qu'ils fournissent. Les aires protégées fournissent des services directs ou indirects. Il est donc possible de mettre en place des paiements pour services environnementaux à plusieurs échelles, internationale, nationale ou locale. Les écosystèmes rendent des services à l'humanité comme la purification de l'eau, la stabilisation du climat et la protection contre les tempêtes et l'érosion. Le type, la nature et la quantité de services que génèrent un écosystème peuvent être affectés par la manière dont l'individu et la communauté utilisent les différentes ressources le composant. Quand les avantages tirés d'un service environnemental sont bénéfiques à une personne différente de celle prenant les décisions de gestion, les intérêts publics et les intérêts du gestionnaire de la ressource peuvent entrer en conflit. Les paiements pour services environnementaux ont vu le jour en tant qu'outil politique visant à réconcilier les intérêts privés et publics lors de décisions liées à l'environnement. Le but de cet instrument est de pousser les propriétaires terriens et les gestionnaires de ressources à internaliser les bénéfices qu'ils génèrent pour la société. Le PSE est un mécanisme incitatif dont l'approche est fondée sur une proposition théorique claire : payer les individus ou les communautés pour entreprendre des actions améliorant l'efficacité de services environnementaux précis. Ce terme fut défini de manière plus formelle par Wunder (2007) : « un système de PSE est un accord volontaire conditionnel entre au moins un “vendeur” et un “acheteur”, fondé sur un service environnemental, ou une utilisation du sol sensée produire ce service, bien défini ». Une illustration simplifiée peut être retrouvée sur http://www.fao.org/ES/ESA/pesal/aboutPES5.html. Le point commun des différentes définitions fait référence à la transaction volontaire au cours de laquelle le fournisseur d'un service est payé par les bénéficiaires de ce service ou en leur nom. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), il existe différents types de schémas de PSE :
- Les schémas de paiement directs Le gouvernement rémunère le propriétaire du terrain au nom de la société civile (parfois avec la contribution du secteur privé) afin que celui-ci adopte des pratiques améliorées de gestion des sols dans le but de résoudre un problème environnemental particulier
- Les schémas de PES fondés sur la production Le consommateur paye une « taxe verte » en plus du prix du marché d'un produit ou d'un service afin de s'assurer que celui-ci a été produit selon un procédé respectueux de l'environnement ainsi que de la protection des services environnementaux lui étant liés. Le respect de ces consignes est vérifié par un organe de vérification indépendant.
> Au cours des décennies passées, les schémas de paiements pour services environnementaux (PSE) ont pris une importance croissante en tant qu’instruments politiques de préservation environnementale, se développant rapidement partout dans le monde, que ce soit dans les pays en développement ou dans les pays développés. On observe généralement l'apparition de schémas PES lors de la conservation de trois types de services environnementaux :
- La qualité de l'eau, sa quantité et les mesures incluant la conservation des sols afin de contrôler l'érosion et les flux de sédiments dans les rivières et les réservoirs et de réduire les risques de glissements de terrain et d'inondations
- La fixation du carbone et la protection des puits de carbone afin de répondre à la demande en marchés d'émissions carbone volontaires et régulateurs
- La conservation de la biodiversité en finançant des zones de conservation à biodiversité importante (dans les zones tampon de régions protégées, les corridors biologiques ou les parcelles de végétation native et en protégeant la biodiversité agricole).
♦ Équivalent étranger : Payments for ecosystem services (PES).
|